Les Grems

393 AC - Ma première réaction, quand Bash est venu me trouver pour me demander de le remplacer, c'est de me dire qu'il avait du toupet de me déranger pour ce qui était visiblement une gueule de bois. Puis je me suis souvenue de l'incident, de sa barbe roussie, et de la faveur que je lui devais, et j'ai acquiescé sans mot dire. C'est pourquoi je suis en train de m'accroupir, d'enjamber des tuyaux, de me faufiler entre les canalisations, pour trouver la cause de la panne qui affecte la raffinerie depuis quelques heures. Bien sûr, il n'y a aucune carte qui permette de se repérer là-dedans, tout au plus des flèches et des panneaux pour au moins m'indiquer que je ne fais pas fausse route. Vu que l'acheminement de Sève était stoppé, ce devait être un problème de pompe ou de valve. On avait d'ailleurs dû se rabattre sur la vapeur pour faire fonctionner l'ensemble, histoire de ne pas gâcher de Kélon...

Clang. Un bruit sourd, suivi d'un jacassement syncopé. Problème de pompe, ou peut-être de nuisibles, en fin de compte. Je me positionne derrière un tuyau bouillant, prenant soin de ne pas me brûler. Puis je jette un regard de biais vers la source du bruit. Trois Grems, en train de s'attaquer à un panneau régulateur. J'aurais dû m'en douter. Le problème, quand on prend appui sur l'imagination pour créer, c'est qu'on génère par inadvertance des choses de notre inconscient sur lesquelles on n'a que peu d'emprise. Même chez des ingénieurs qui ont plus tendance à s'appuyer sur la raison que sur des balivernes. Et ces trois lascars viennent tout droit de la superstition la plus basique. Je sors mon Construct de son étui, et me demande quel serait le meilleur moyen de les faire déguerpir. Et celui qui me vient en tête implique forcément de leur jouer un mauvais tour en retour...

C'est au début du XXème siècle, pour expliquer les avaries parfois incompréhensibles qui frappaient les aéronefs, que la légende des Gremlins a vu le jour. C'est par le biais de ces créatures farfelues qu'ont été expliqués les dysfonctionnements de certains équipements, les erreurs de pilotage ou bien les soucis techniques qu'expérimentaient les aviateurs et les équipes aéronautiques. Pour les pilotes de la R.A.F., la Royal Air Force britannique, un sabotage équivalait à l'intervention de ces lutins espiègles.

SIERRA